Un capitaine anglais sur la Côte des Esclaves, 1694, d'après l' Histoire
générale des Voyages de l'abbé Prévost
SOMMAIRE
Le 20 [mai 1694] au soir, on arriva sur la côte de Juida (Juda, Ouidah), environ soixante lieues à l'est d'Akra [Accra]. Dès le lendemain, les deux capitaines [Phillips et Clay], accompagnés de leurs chapelains, de leurs trésoriers, et d'une douzaine de matelots bien armés, se rendirent au rivage, dans la résolution de s'y arrêter jusqu'à ce qu'ils eussent trouvé l'occasion d'acheter treize cents esclaves… Le comptoir anglais étant à trois milles de la côte […], dans des marais, où l'air est très malsain. Mais les deux capitaines s'estimèrent fort heureux de trouver cette retraite pour leurs marchandises, qui ayant été débarquées fort tard, ne pouvaient arriver avant la fin du jour à la Ville royale, où les facteurs avaient leur magasin. Elles auraient été fort exposées au pillage des nègres, et de ceux mêmes qui les portaient, car ils ont tant de subtilité à voler ce qui excite leur convoitise ou leur curiosité, que pendant le jour même on a besoin de veiller continuellement sur eux… Source : Abbé Antoine-François PREVOST d'EXILES, Histoire générale des voyages, Didot, Paris, 1746-1759, 20 vol., extrait du livre III, BNF
La prise de contact avec le royaume de Ouidah
Le comptoir devint encore utile aux deux capitaines pour y loger les esclaves, lorsque ayant été conduits au rivage, le mauvais temps ne permettait point aux canots de venir les prendre et de les transporter à bord ; car il s'en trouvait quelquefois cent qui devaient être embarqués à la fois. C'était d'ailleurs une triste habitation que ce comptoir. Les marais y produisent une puanteur continuelle, et des essaims de mosquites [moustiques], si insupportables que si l'on n'a recours au laudanum, ou à quelque autre soporifique, il faut renoncer au sommeil...
La ville royale de Juida est à quatre milles du comptoir anglais... A l'arrivée des deux vaisseaux, le Roi envoya au comptoir anglais deux de ses kabaschirs, ou de ses nobles chargés d'un compliment pour les facteurs. Phillips et Clay, qui étaient déjà débarqués, firent répondre au Monarque qu'ils iraient le lendemain lui rendre leurs devoirs. Cette réponse ne le satisfit pas. Il fit partir sur le champ deux autres de ses Grands, pour les inviter à venir dès le même jour, et les avertir non seulement qu'il les attendait, mais que tous les capitaines qui les avaient précédés étaient venus le voir dès le premier jour. Sur quoi, dans la crainte de l'offenser, les deux capitaines, accompagnés de Pierson [le chef du comptoir] et de leurs gens, se mirent en chemin pour la ville royale.
Ils furent reçus à la porte du palais par plusieurs kabaschirs, qui les saluèrent à la mode ordinaire des nègres, c'est-à-dire en faisant d'abord claquer leurs doigts et leur serrant ensuite les mains avec beaucoup d'amitié. Lorsqu'ils eurent traversé la cour, les mêmes seigneurs se jetèrent à genoux près de l'appartement du Roi, firent claquer leurs doigts, touchèrent la terre du front, et la baisèrent trois fois ; cérémonie ordinaire lorsqu'ils approchent de leur maître…
Sa Majesté, qui était cachée derrière un rideau, ayant jeté les yeux sur les Anglais par une petite ouverture, leur fit signe d'approcher. Ils s'avancèrent vers le trône, qui était une estrade d'argile, de la hauteur de deux pieds, environnée de vieux rideaux sales qui ne se tirent jamais, parce que le Monarque n'accorde point à ses kabaschirs l'honneur de le voir au visage. Il avait près de lui deux ou trois petits nègres, qui étaient ses enfants. Il tenait à la bouche une longue pipe de bois, dont la tête aurait pu contenir une once de tabac. A son côté il avait une bouteille d'eau-de-vie, avec une petite tasse en argent assez malpropre. Sa tête était couverte, ou plutôt liée, d'un calicot fort grossier; et pour habit, il portait une robe de damas rouge…
Les Anglais se découvrirent la tête pour le saluer. Il prit les deux capitaines par la main, et leur dit d'un air obligeant qu'il avait eu beaucoup d'impatience de les voir; qu'il aimait leur nation; qu'ils étaient ses frères, et qu'il leur rendrait tous les bons offices qui dépendraient de lui. Ils le firent assurer, par l'interprète, de leur reconnaissance personnelle, et de l'affection de la Compagnie royale d'Angleterre, qui malgré les offres qu'elle recevait de plusieurs pays où les esclaves étaient en abondance, aimait mieux tourner son commerce vers le royaume de Juida, pour y faire apporter toutes les commodités dont il avait besoin. Ils ajoutèrent qu'avec de tels sentiments, ils se flattaient que Sa Majesté ne ferait pas traîner en longueur sa cargaison d'esclaves, principal objet de leur voyage, et qu'elle ne souffrirait pas que ses kabaschirs leur en imposassent le prix. Enfin, ils promirent qu'à leur retour en Angleterre, ils rendraient compte à leurs maîtres de ses faveurs et de ses bontés.
Il répondit que la Compagnie royale d'Afrique était « un fort honnête homme », qu'il l'aimait sincèrement, et qu'on traiterait de bonne foi avec ses marchands. Cependant il tint mal sa parole; ou plutôt malgré les témoignages de respect qu'il recevait de ses kabaschirs, il fit voir par sa conduite qu'il n'osait rien faire qui leur déplût.
Les tractations et l'achat des esclaves
Le lendemain, suivant leurs promesses, ils retournèrent au palais avec des essais de leurs marchandises; et l'on convint du prix des esclaves. Ces conventions ou ces traités portent à Juida le nom de palavera (palabre), quoique dans les régions occidentales de l'Afrique, le même mot signifie au contraire dispute ou querelle. Après beaucoup de difficultés, on convint de cent livres de kowris (cauris) pour chaque esclave. Alors le Roi fit assigner aux marchands anglais des magasins, une cuisine et des logements. Mais toutes les chambres étant sans porte, ils furent obligés d'en faire à leurs frais et d'y mettre des verrous et des serrures. Le jour suivant ils payèrent les droits ordinaires au Roi et aux kabaschirs ; après quoi les officiers du commerce firent avertir les habitants de la ville, au son d'une cloche, d'amener leurs esclaves au marché. Cette cloche, qui est de fer, a la forme d'un pain de sucre, et contiendrait environ vingt livres de kowris. On frappe dessus avec un bâton, qui en tire un son fort faible et sourd.
Chaque jour au matin, le Roi invitait les deux capitaines à déjeuner, et leur offrait toujours ses deux plats de poules étuvées et de patates bouillies à l'eau. Mais il leur envoyait tous les jours pour leur table un porc, une chèvre, une brebis, et une bouteille de pitto. De leur côté, ils lui faisaient porter avec la même régularité quatre bouteilles d'eau-de-vie, qu'il recevait comme le souverain bien. Comme ils avaient leur cuisinier dans la ville, et que les provisions y étaient en abondance, ils faisaient fort bonne chère. Mais divers accidents leur firent bientôt perdre l'appétit. La plupart de leurs gens furent attaqués de la fièvre. Phillips fut atteint lui-même d'un violent mal de tête. A peine se trouva-t-il capable d'aller au marché sans être soutenu, et la mauvaise odeur du lieu lui causait quelquefois des évanouissements dangereux. Cette halle, que les habitants appellent trunk, était un vieux bâtiment où l'on faisait passer la nuit aux esclaves, dans la nécessité d'y faire tous leurs excréments. Trois ou quatre heures que Phillips était obligé d'y passer tous les jours ruinèrent tout à fait sa santé.
Les esclaves du Roi furent les premiers qu'on offrit en vente, et les kabaschirs exigèrent qu'ils fussent achetés avant qu'on en produisît d'autres, sous prétexte qu'étant de la maison royale ils ne devaient pas être refusés, quoiqu'ils fussent non seulement les plus difformes, mais encore les plus chers. Mais c'était une des prérogatives du Roi, à laquelle on était forcé de soumettre. Les kabaschirs amenaient eux-mêmes ceux qu'ils voulaient vendre, chacun selon son rang et sa qualité. Ils étaient livrés aux observations des chirurgiens anglais, qui examinaient soigneusement s'ils étaient sains et s'ils n'avaient aucune imperfection dans les membres. Ils leur faisaient étendre les bras et les jambes. Ils les faisaient sauter, tousser. Ils les forçaient d'ouvrir la bouche et montrer les dents, pour juger de leur âge; car étant tous rasés avant que de paraître aux yeux des marchands, et bien frottés d'huile de palmier, il n'était pas aisé de distinguer autrement les vieillards de ceux qui étaient dans le milieu de l'âge. La principale attention était à ne point acheter de malades, de peur que leur infection ne devînt bientôt contagieuse. La maladie qu'ils appellent yaws est fort commune parmi ces misérables. Elle a presque les mêmes symptômes que la vérole; ce qui oblige le chirurgien à examiner les deux sexes avec la dernière exactitude. On met les hommes et les femmes à part, séparés par une cloison de grosses barres de bois, pour prévenir les querelles.
Après avoir fait le choix de ceux qu'on veut acheter, on convient du prix et de la nature des marchandises. Mais la précaution que les facteurs avaient eue de commencer par cet article leur épargna les difficultés qui naissent ordinairement. Ils donnèrent aux propriétaires des billets signés de leur main, par lesquels ils s'engageaient à délivrer les marchandises en recevant les esclaves. L'échange se fit le jour d'après. Phillips et Clay firent marquer cette misérable troupe avec un fer chaud à la poitrine et sur les épaules, chacun de la première lettre du nom de son bâtiment. La place de la marque est frottée auparavant d'huile de palmier; mais cette opération est si peu douloureuse, que trois ou quatre jours suffisent pour refermer la plaie, et pour faire paraître les chairs fort saines.
L'embarquement et le traitement des esclaves. Les résistances
A mesure qu'on a payé pour cinquante ou soixante, on les fait conduire au rivage. Un kabaschirs, sous le titre de Capitaine d'esclaves, prend soin de les embarquer et de les rendre sûrement à bord. S'il s'en perdait quelqu'un dans l'embarquement, c'est le kabaschirs qui en répond aux facteurs; comme c'est le capitaine du : trunk ou du marché qui est responsable de ceux qui s'échapperaient pendant la vente, et jusqu'au moment qu'on leur fait quitter la ville. Dans le chemin jusqu'à la mer, ils sont conduits par deux autres officiers que le Roi nomme lui-même, et qui reçoivent de chaque vaisseau, pour prix de leur peine, la valeur d'un esclave en marchandises. Tous les devoirs furent remplis si fidèlement, que de treize cents esclaves, achetés et conduits dans une espace si court, il ne s'en perdit pas un.
Il y a aussi un capitaine de terre, dont la commission est de garantir les marchandises du pillage et du larcin. Après les avoir débarquées, on est parfois forcé de les laisser une nuit entière sur le rivage, parce qu'il ne se présente pas assez de porteurs. Malgré les soins et l'autorité du capitaine, il est difficile de mettre tout à couvert. Il l'est encore plus d'obtenir la restitution de ce qu'on a perdu.
Lorsque les esclaves sont arrivés au bord de la mer, les canots des vaisseaux les conduisent à la barque longue, qui les transporte à bord. On ne tarde point à les mettre aux fers, deux à deux, dans la crainte qu'ils ne se soulèvent, ou qu'ils ne s'échappent à la nage. Ils ont tant de regret à s'éloigner de leur pays, qu'ils saisissent l'occasion de sauter dans la mer, hors du canot, de la barque ou du vaisseau, et qu'ils demeurent au fond des flots jusqu'à ce que l'eau les étouffe. Le nom de la Barbade leur cause plus d'effroi que celui de l'enfer, quoiqu'au fond, dit l'auteur, ils y mènent une vie beaucoup plus douce que dans leur pays. On en a vu plusieurs dévorés par les requins, au moment qu'ils s'élançaient dans la mer. Ces animaux sont si accoutumés à profiter du malheur des nègres, qu'ils suivent quelquefois un vaisseau jusqu'à la Barbade, pour faire leur proie des esclaves qui meurent en chemin, et dont on jette les cadavres hors du bord. Phillips raconte qu'il en voyait tous les jours quelques-uns autour de son bâtiment; mais il ne peut assurer, dit-il, que ce fussent les mêmes.
Les deux vaisseaux perdirent douze nègres, qui se noyèrent volontairement, et quelques autres qui se laissèrent mourir par une obstination désespérée à ne prendre aucune nourriture. Ils sont persuadés qu'en mourant ils retournent aussitôt dans leur patrie. On conseillait à Phillips de faire couper à quelques-uns des bras et des jambes, pour effrayer les autres par l'exemple. D'autres capitaines s'étaient bien trouvés de cette rigueur. Mais il ne put se résoudre à traiter, avec tant de barbarie, de misérables créatures qui étaient comme lui l'ouvrage de Dieu, et qui n'étaient pas, dit-il, moins chères au Créateur que les blancs. Il ajoute qu'il ne voit aucune raison de les mépriser pour leur couleur, puisqu'ils l'ont reçue de la nature, et qu'il ne comprend pas pourquoi les blancs croiraient valoir mieux dans l'intérieur.
Un capitaine anglais sur la Côte des Esclaves,
1694, d'après l' Histoire générale des Voyages de l'abbé Prévost
Le texte relate des opérations de traite au royaume d'Ouidah en 1694, et présente par là un certain nombre d'informations utiles pour comprendre la nature du commerce des hommes sur la côte d'Afrique. Mais, plusieurs fois publié en Europe dans la première moitié du XVIIIème siècle, sous des formes diverses, il témoigne aussi d'une mise en scène à destination des lecteurs des récits de voyage curieux d'exotisme, mais qui pourraient être heurtés par la brutalité ordinaire des capitaines négriers.
Les récits de voyage sont un genre en plein développement au XVIIIe siècle. La traduction de la collection anglaise d'Astley, A New General Collection of Voyages and Travels , qu'entreprend l'abbé Prévost, sous le titre d'une Histoire générale des Voyages , vise à combler le retard de la France dans ce domaine et paraît à partir de 1746. Prévost reste seul maître de l'ouvrage après l'interruption de la collection britannique, mais l'histoire des voyages en Afrique reste une traduction. Les auteurs de la New General Collection utilisent, pour le texte reproduit ci-dessous, le récit du capitaine anglais Phillips paru en 1732 dans le recueil de Churchill, A New collection of Voyages and travels . De manière générale, au XVIIIe siècle, le récit de voyage, malgré l'austérité des considérations nautiques ou commerciales, apparaît comme un récit d'aventures, utilise volontiers les ressorts du romanesque, satisfait les désirs d'exotisme du public et inspire les auteurs de fiction (Prévost lui-même avait écrit les Aventures de Robert Lade, où des récits authentiques cohabitent avec une Afrique imaginaire).
Dans cet extrait du livre III de l' Histoire des voyages, le capitaine Phillips relate les transactions auxquelles il se livre en 1694 au royaume de Ouidah, sur la Côte des Esclaves .
Selon l'historien Elikia M'Bokolo, Ouidah est "le fleuron des centres négriers" . Les Français s'y sont installés en 1671, suivis des Anglais, des Hollandais, des Brandebourgeois et des Portugais ; l'influence des Européens grandit au point que les rois apparaissent de plus en plus comme les simples protégés des négriers. Cet état de fait suscite une sourde opposition qui rend plus facile la conquête de Juda par le roi de Dahomey en 1727.
Le capitaine Thomas Phillips, qui a surtout navigué jusque là dans les mers du Levant et a été quelque temps prisonnier des Français, commande l' Hannibal, un navire de la Compagnie royale d'Afrique fondée en 1672. Parti de Londres avec 70 hommes d'équipage à la fin d'Octobre 1693 à destination de la côte occidentale de l'Afrique , il doit acquérir 700 esclaves et les transporter à la Barbade. Il navigue en compagnie du navire du capitaine Schurley, grand connaisseur de la côte d'Afrique, mais qui meurt au large d'Accra; il est remplacé par le capitaine Clay, et c'est en compagnie de ce dernier que Phillips débarque dans le royaume de Ouidah, où les Européens se font une concurrence acharnée. Il obtient la plus grande partie de sa cargaison dans cet important centre de traite; celle-ci est composée pour 66% d'hommes, 27% de femmes et pour 7% d'enfants. Le bilan global de son voyage n'est cependant pas aussi avantageux qu'il aurait pu l'espérer. A l'arrivée à la Barbade, après 100 jours de navigation, un peu plus de la moitié des esclaves embarqués, soit 53% seulement, ont survécu, alors que le taux moyen pour la période est de plus de 80%.
Phillips apparaît tout au long de ce récit, destiné à un public curieux des récits de voyage et des aventures au-delà des mers, à la fois comme un commerçant avisé et soucieux des intérêts de la Compagnie royale d'Afrique qui l'emploie, mais aussi un homme honorable dont les scrupules religieux évitent toute rigueur inutile à l'égard des esclaves achetés. Cependant, dans ce milieu exotique où il débarque, il affiche la suffisance à l'égard des populations et de ses partenaires commerciaux, somme toute naturelle à un Européen sur les côtes d'Afrique.
Le tableau du Roi et des agents les montre de leur côté aussi soucieux de leurs intérêts, volontiers retors et cupides. Quant aux esclaves, marchandises humaines, il parle peu de leur comportement et de leurs sentiments sauf au moment de l'embarquement, quand leurs angoisses et leur désespoir risquent d'occasionner des pertes à la Compagnie royale d'Afrique.
Jean-Claude HALPERN
Un capitaine anglais sur la Côte des Esclaves, 1694, d'après l' Histoire
générale des Voyages de l'abbé Prévost
Complété par la carte et les plans joints, le texte peut être utilisé dans plusieurs directions:
- La description des différentes phases d'une opération de traite sur la côte d'Afrique.
- La présentation du capitaine anglais, agent de la Compagnie royale d'Afrique, commerçant avisé et cynique, mais soucieux de son image vis-à-vis du public européen auquel il a à l'origine destiné son récit.
- La présentation des intermédiaires: le roi d'Ouidah, incontournable, et ses auxiliaires, aussi cupides et retors que leur maître.
- La description de la façon dont les esclaves sont traités par les négriers africains et européens.
Jean-Claude HALPERN
4e, 2nde lycée professionnel Histoire
Un capitaine anglais sur la Côte des Esclaves, 1694, d'après l' « Histoire générale des Voyages » de l'abbé Prévost
Source :Abbé Antoine-François PREVOST d'EXILES, Histoire générale des voyages, Didot, Paris, 1747, Livre IV, p.360, BNF
Les Anglais, comme les Français, ont construit un fort à Ouidah, au milieu des marais. Sur le papier, ces forts ont une allure martiale. Mais en réalité, « il n'y a ici de sûreté pour les Européens, que l'intérêt même des Nègres » (Histoire des voyages, Livre 4, p.359) Le fort anglais est construit en argile, couvert de chaume, entouré de fossés secs (en noir sur le plan). On y accède par un pont-levis. Il s'agit, malgré la présence de quelques soldats blancs, sous l'autorité d'un officier, et de quelques pièces de canon, plus de magasins que d'une installation militaire. Le fort emploie un certain nombre d'esclaves africains. Il est significatif que, dans le texte principal, Phillips parle seulement d'un « comptoir », utile pour entreposer à l'abri des vols les marchandises débarquées des navires, et loger les esclaves achetés avant leur embarquement.