J-B Mosneron de l'Aunay, député du commerce, défend la traite
26 Février 1790


« Il convient Messieurs de ne pas perdre un moment pour rassurer les planteurs et pour les ramener aux sentiments d'amour et d'attachement qu'ils doivent à la mère patrie. Il faut ôter tout prétexte aux ennemis étrangers et intérieurs : il faut donc que l' Assemblée décrète que la traite des Noirs sera continuée comme par le passé.

Ici j'aperçois la Déclaration des Droits de l'Homme qui repousse ce décret : cette Déclaration, Messieurs, est un fanal lumineux qui éclairera toutes les décisions de l'Assemblée nationale qui auront la France pour objet ; mais j'aurai le courage de vous dire que c'est un écueil placé dans toutes nos relations extérieures et maritimes. Il est nécessaire de tourner ce danger contre lequel nos navires et la fortune publique se briseront. [...]

Ce n'est pas tout, Messieurs : les décrets de l'Assemblée nationale peuvent arriver dans nos colonies au moment où la fermentation sera telle que les bons esprits ne pourront plus la dominer, au moment où les Anglais auront tout disposé pour l'insurrection. [...]

C'est, Messieurs, au nom des finances que la perte de vos colonies ruinerait dans ses ressources, au nom de six millions d'hommes qui en vivent et que le désespoir porterait à tous les excès, au nom de la mendicité que vous voulez détruire et que vous ne pouvez combattre efficacement que par le travail des ports de mer et des manufactures ; c'est au nom même de votre marine militaire nécessaire à la dignité de l'Empire et à sa conservation dans l'étendue de trois cents lieues de côte, c'est enfin au nom de la Révolution à laquelle vous devez attacher tous les citoyens par les plus puissants intérêts, que je vous conjure de prendre dans la plus prompte et la plus sérieuse considération les divers objets que les députés du commerce, réunis aux citoyens de la Guyane, ont soumis à l'Assemblée nationale. »




 


Source : Jean-Baptiste Mosneron de l'Aunay, député du commerce de Nantes, au club des Jacobins, le 26 février 1790